La prise de participation majoritaire du géant singapourien (OLAM) dans le capital de la Nouvelle Société cotonnière du Togo (NSCT) à hauteur de 51 % pour un montant de 22 milliards de francs CFA en 2020 devrait permettre de relancer la production et d’amorcer un virage industriel. Les cotonculteurs détiennent 40% et l’Etat 9%.
D'après les autorités togolaises, la cession a pour objectif de doubler les rendements de la NSCT, notamment en exploitant la carte de fertilité des sols, de moderniser l'outil industriel sur toute la chaîne de la production jusqu'à la transformation et de développer la marque "coton made in Togo" afin de jouir d'un meilleur rapport qualité-prix.
Le coton représente la première culture de rente des exploitations agricoles et la première culture industrielle du Togo. Entre 2019 et 2023, la production a chuté de plus de 66 %, passant de 137 266 tonnes à 67.000 tonnes (2020-2021), 52 528 tonnes (2021-2022) puis seulement à 46 549 tonnes (2022-2023).
En comparant, cette baisse fulgurante au Togo avec plusieurs pays où Olam est présent, c’est le jour et la nuit.
« Le groupe Olam au Tchad, est arrivé quand le Coton était à 16 000 tonnes et à en moins d'une année, ils ont pu augmenter la production à 116 mille tonnes ; en côte d'ivoire où le rendement au champ et le rendement fibre à l'égrenage a progressé de 43 voire 44% avec la rénovation des usines etc. Au Togo par contre, avant leur arrivée, nous avons un rendement entre 600-700 kg à l'hectare, et on pensait pouvoir passer à 900 kg voire 1 tonne, mais jusqu’à cette nouvelle campagne, rien de concret en termes d'augmentation de rendement », a expliqué le Président des producteurs du coton.
Cette baisse de la production nationale s’explique selon la FNGPC par le manque de camions pour le chargement entrainant la pourriture du coton dans les champs, une grande quantité de coton à graine jetée à l’usine à cause de l’humidité due à la pluie, le paiement après la récolte difficile et tardif aux producteurs pour préparer la prochaine campagne de production, la mise à disponibilité tardive des engrais et pesticides, une dette fictive cumule de 14 milliards FCFA accrochée à la fédération par Olam, tous les projet de la construction d’usines de transformation et la réhabilitation des pistes rurales n’ont pas vu le jour.
Récemment, la NSCT dans un communiqué de presse a annoncé pour la campagne cotonnière 2023/2024, une production cotonnière de 67 718 tonnes et un rendement de 844 kilogrammes à l'hectare soit une hausse de 45% par rapport à la campagne précédente au Togo. Aussi, toutes les régions du Togo ont vu leur performance s'améliorer, ce qui, selon Olam, a généré des revenus bruts dépassant les 20 milliards de francs CFA.
« C’est de faux calculs et chiffres annoncé car nous avons produit du coton cette année sur 100 mille hectares sur toute l’étendue du Togo pour sortir un peu de 67 000 tonnes. Et quand on divise les 100 mille hectares sur les 67 mille tonnes, on est 600 kg en moyenne à l’hectare. Voilà les chiffres réels en ce qui concerne la production de coton pour le compte de la campagne 2023. Sur la question des 20 milliards F.CFA, les producteurs indiquent qu’ils n’ont pas encore soldés les prix des intrants dans les paiements, la main d’œuvre, l'entretien des parcelles et autres. Si nous sortons des 20 milliards tout ceci, le producteur n’a rien. Pourquoi mentir aujourd’hui sur le dos du producteur que nous sommes », martèle Koussouwè Kouroufei.
Normalement, la production de la campagne 2023-2024, devrait atteindre 70 000 tonnes, si les dispositions ont été prises plus tôt par le groupe Olam en associant la FNGPC qui dispose de l’expertise depuis des années.
Le comble, à en croire Matinkawe Kpessakom, PCA de l’Union régionale des producteurs de coton de la maritime, avec cette hausse de la production qui devrait soulager les producteurs, OLAM a décidé systématiquement et personnellement de passer le prix du Kg de la graine coton de 300 FCFA à 274 FCFA pour la nouvelle campagne cotonnière au Togo. Au même moment, l’engrais de 50 kg passe de 14 000 FCFA à 25 000 FCFA.
« Nous projetons faire des manifestations de cessation de semer du coton cette année et dans la région des savanes, les producteurs commencent par exécuter ce mot d’ordre. C’est pour que les autorités comprennent les réalités des difficultés rencontrées sur le terrain. Olam qui a le monopole de 60% de la production nationale est à la fois acheteur et vendeur des graines de coton! C'est par normal », a-t-il indiqué.
Ainsi, l’or blanc togolais a du mal à retrouver son lustre d’antan, alors qu’il continue de représenter la première culture d’exportation du Togo en termes de revenu.
« On ne veut plus d’Olam. Le miracle ne s’est pas produit. Atteindre 200 000 tonnes d'ici 2025 peut être un objectif ambitieux, mais je pense que nous ne pouvons pas dépasser les 100 000 tonnes d'ici cette échéance », a déclaré M. Kouroufei.
Le président de la FNGPC en appelle au président de la République Faure Gnassingbé pour régler pacifiquement le différend avec le groupe Olam.
Ainsi, comme solutions proposées pour apaiser la situation, la FNGPC souhaite la mise en place de l’interprofession de la filière coton, la création d’un fonds soutien à la filière, la nomination d’un Directeur général par l’Etat togolais de la NSCT, la correction du mécanisme de vente et de fixation des prix, la révision du parc d’actionnaires relatif à la NSCT.
Soulignons que la fédération nationale des groupements de producteurs de coton compte aujourd'hui 5 Unions régionales pour 27 Unions préfectorales avec 3075 groupements de producteurs. Au total 153 000 cotonculteurs ont été enregistrés sur toute l'étendue du territoire national.