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« L’ODD 14 est le moins financé car c’est le moins bien connu en Afrique tout simplement. On maitrise très mal les potentiels qu’offre l’espace marin », dixit Nassim Oulmane de la CEA

mars 16, 2023 0 1766
« L’ODD 14 est le moins financé car c’est le moins bien connu en Afrique tout simplement. On maitrise très mal les potentiels qu’offre l’espace marin », dixit Nassim Oulmane de la CEA Nassim Oulmane

 

L’Objectif pour le Développement Durable (ODD 14)  « Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable » est le moins financé car c’est le moins connu en Afrique tout simplement », c’est l’information révélée par M. Nassim Oulmane, Chef de l’économie verte et bleue à la Commission Economique pour l’Afrique (CEA) le 16 mars 2023 en marge de la 55è session des ministres de l’Economie et des Finances et de la planification à Addis-Abeba.

Les océans, les rivières et les lacs jouent un rôle essentiel dans la vie de millions de personnes en Afrique. L'économie bleue pourrait apporter jusqu'à 1 500 milliards de dollars à l'économie mondiale si elle était gérée de manière efficace et durable.

« Les pays africains doivent renforcer leurs capacités institutionnelles en matière de gestion du milieu marin et intégrer la biodiversité dans leurs plans de développement. Nous devons augmenter le nombre d'enfants scolarisés et développer une approche STEM qui associe l'éducation à l'esprit d'entreprise et à la capacité d'innovation pour résoudre certains des problèmes auxquels nous sommes confrontés, notamment le changement climatique », a indiqué Nassim Oulmane, au cours d’une interview dans les lignes à suivre.

 

Pourquoi l’ODD 4 est un parent pauvre du financement ?

Nassim Oulmane: L’Objectif pour le Développement Durable (ODD 14)  « Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable » est le moins financé car c’est le moins bien connu en Afrique tout simplement. On maitrise très mal les potentiels qu’offrent l’espace marin, les océans, les rivières, la mer, bref tout ce qui est lié à l’eau qui permet le développement économique. C’est un constat embarrassant mais en même temps un motif d’espoir de potentiel énorme. Le Secrétaire Général de l’ONU à la dernière réunion des Nations unies sur les océans à Lisbonne en juin 2022 a indiqué qu’avec les mers et océans, on peut multiplier par 6 la quantité de nourriture. Par rapport aux crises alimentaires et aux dynamiques démographiques auxquelles le monde fait face, l’exploitation durable et rationnelle des mers et océans permettrait d’apporter des réponses rapides. Malheureusement, c’est un domaine qu’on maitrise mal alors qu’il représente 70% de la terre.

Que faire alors ?

Nassim Oulmane: A ce titre, nous avons lancé l’initiative pilote de la Grande muraille bleu avec l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui inspire le reste du monde. On dispose des demandes de partenariats, des requêtes d’autres parties du monde pour mettre sur pied également la Grande muraille bleu. Pour le moment, le projet concerne, le versant Est du continent, sur l’océan indien occidental, les pays africains de l’océan Indien et vise à ce que la conservation de la nature soit associée aux activités socioéconomiques des communautés côtières et en même temps à une échelle régionale pour pouvoir commencer à avoir un impact climatique. Aujourd’hui, les communautés savent ce qu’elles doivent faire pour la santé des océans et mers, juste qu’elles ne disposent pas des moyens et elles le font à une échelle petite. Il s’agit de passer à une échelle plus grande avec des moyens plus grands et de manière grande. On n’est à une intersection entre la conservation de la nature, l’activité socioéconomique et l’action climatique. Cela permet d’accéder à des financements énormes au niveau des financements climatiques. Vous savez, nos interlocuteurs exigent des projets de taille importante qui ont un impact réel et direct sur le climat. Il s’agit de faire des communautés côtières des garantes de la protection de la nature mais aussi les rémunérer pour les diverses activités du projet.

Que doivent faire les pays africains côtiers pour être bénéficiaires de ce projet?

Nassim Oulmane: Nous devons démontrer d’abord que la bonne approche c’est le bon modèle (pilote) à mettre en œuvre sur le terrain à travers des projets concrets, mettre ensemble les pays. C’est pourquoi nous organisons dans le cadre de la présidence comorienne à l’Union Africaine (UA) en Mai prochain à Comores, un atelier avec les pays de la région de l’Afrique de l’Est concernés pour justement bâtir un projet commun et pouvoir avoir des financements du Fonds vert climat. C’est une étape concrète qui permet de mettre ensemble les pays dans la dynamique, construire des pipelines de projets pour avoir accès à des financements dont seul il est difficile d’accéder. L’objectif, c’est d’être ensemble et renforcer les actions solidaires en faveur des océans et mers. Nous sommes convaincus que si vous protégez 30% de votre espace marin et que votre pays voisin ne le fait pas, l’efficacité de l’action est relativement réduite par contre, ensemble, les actions sont plus efficaces, d’ailleurs il est démontré que la capacité des océans à se régénérer vite est beaucoup plus importante qu’on ne le pense. Mais on peut atteindre tout cela si on le fait de manière coordonnée, ce sera le seul moyen collectif, coopératif d’arriver à lutter contre le changement climatique de manière efficace mais en même temps à permettre aux communautés qui vivent à côté de ces espaces d’avoir une vie décente.

L’économie bleue peut jouer un rôle dans la lutte contre l’inégalité en Afrique ?   

Nassim Oulmane: Absolument ! Dans nos pays, les populations côtières sont les plus vulnérables qui ont un niveau de vie relativement bas, un pourcentage de revenu peu élevé. Evidemment, l’économie bleue vise à apporter de la richesse économique, des solutions de générer des revenus pas seulement que de subsistance mais j’insiste sur le thème dignité et vie décente. Des revenus qui permettent à ces populations de pouvoir envoyer leurs enfants dans les écoles et universités de qualité, de saisir aussi les opportunités afférentes. C’est pourquoi, dans le cadre de la grande muraille bleue 2, il sera développé tout au long de la bande côtière, des centres d’entreprenariat pour mettre à la disposition des enfants de ces populations, des outils de renforcement de leur capacité, à innover, à apporter de nouvelles solutions basées sur la nature, mettre en place des mécanismes pour financer les projets. Le plus important, c’est de leur donner la capacité d’apprendre pour qu'ils transforment leurs idées en solution, en action climatique, de protection de la nature et génératrices de revenus permettant une vie digne de ce nom.

Propos recueillis par GADAH Joseph

 

 

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Last modified on jeudi, 16 mars 2023 19:03
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